Taulard a
toujours dansé sur la corde raide. Un point d'absolu dans son genre,
en proie à des vents querelleurs. Jusqu'à présent, Taulard s'était
agrippé de toutes ses forces, avait résisté coûte que coûte.
Paradoxalement, les atouts du groupe ont toujours été ces petites
choses fragiles: un chant en français avec des textes doucement
naïfs et un synthé cheap et vierge de tout effet. Jusqu'à présent,
Taulard avait résisté, mais s'est fait prendre dans un moment
d'inattention et a glissé. Rien de bien grave, ni jambe cassée, ni
entorse aggravée. Seulement, ce premier album a un autre goût que
les précédents efforts des grenoblois. Le son un peu incertain de
la première cassette et du 7", tout cela faisait le charme du
groupe, qui a décidé de donner à son premier album un son digne de
ses ambitions. Résultat: Les abords du lycée est propre comme une
paillasse de TP de physique-chimie. Une propreté médicale, qui a
tout blanchit, qui a gratté la moindre aspérité. Ce n'est pas pour
faire l'éloge frontale d'une certaine pauvreté ou saleté, mais une
autre intention musicale a ici pointé son nez. La majorité des
présents morceaux existaient déjà sur le cd -celui enregistré par
Josselin lorsque Taulard n'était pas encore un véritable groupe- ou
sur la demo-tape, et ce sont ces anciennes versions vers lesquelles
je me tournerais encore à l'envie de les écouter. Dans la roche est
la plus grosse déception de cet album. Clairement, cette chanson est
un "hit": une mélodie trop classe et un thème abordé
(les abus sexuels) avec une justesse et une franchise rare, mais
-merde- que vient foutre cette basse funky, -comment dire- cocasse,
ici? Voilà, quelque chose cloche, quelque chose me dérange dans Les
abords du lycée. Une affaire de sensibilité, un décalage qui ne
fonctionne pas. Dommage, car Taulard compose toujours de supers
chansons et l'écriture de Josselin s'affine, avec cette manière
toujours singulière d'introduire un malaise au détour d'une
phrase:"Tempête, qui fait tomber les arbres, qui fait tomber
les gens". Dans tous les cas, Taulard semble attirer de manière
exponentielle l'intérêt des gens. Tant mieux.