On connaissait Pierre de One Second Riot, on repart donc sur des bases acquises pour introduire Blackthread avant de pouvoir tourner définitivement la page. Si l'on regrette fortement la mort prématurée du duo lyonnais, on ne peut que se réjouir de ce nouveau projet de Pierre, ex-bassiste/chanteur du groupe pré-cité. Si l'on doit faire l'analogie entre les deux projets, on peut voir dans Brautigan du duo noise les prémisses de Blackthread. On retrouve ces mêmes spoken-words et l'importance faite à l'ambiant. En solitaire, Blackthread tend vers l'épuration, des armatures légères sur lesquelles se construit un univers fragile, poétique. Falling for Keith guide l'auditeur à travers ces nouveaux paysages, la basse qui est encore là pour fil rouge, trois notes lancinantes qui nous mènent avant de nous perdre. Blackthread s'élabore sur peu de choses : des boucles qui se superposent lentement puis la littéralité des spoken-words qui parfois s'envolent en mélodies planantes (Will it happen again ?). Pierre s'approprie très justement le moindre sample comme l'air de jazz sur le très réussi Dancing with Dave. Chaque titre est un poème récité, flagrant sur Lily ou Threadless sisters (pour ma part, c'est les Identical twins de Diane Arbus qui me hante l'esprit pour ce titre). Le paysage qui l'accompagne est parfois angoissant, parfois sinistre, parfois apaisant. La mélodie naît dans un phrasé, une accentuation, un détail, une répétition. Blackthread se dégage de toute influence notable, il n'est d'ailleurs sûrement pas sans raison qu'il cite volontiers des artistes, peintres, photographes ou écrivains pour références. Néanmoins, certaines chansons nous replongent dans des états émotifs éprouvés à l'écoute d'autres formations ; Joy Division pour On the road ou le Nine Inch Nails de Right where it belongs sur My dear friend. On ne pourra pas vraiment mettre en lien le climat qui se dégage de ces huit titres avec l'illustration pourtant très jolie d'Amandine Urruty qui figure sur la pochette, puisque le monde de Blackthread est loin d'être enfantin ou naïf. Le monde que Blackthread peint se trouve justement à l'opposé, un monde adulte grave qui effraie et qui fascine à la fois. Blackthread est propice à l'évasion, à l'introspection, à la contemplation. Tout y est affaire de projection, de ressenti.
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