samedi 18 décembre 2010

Daïtro - Y



Parfois, on a envie de tout remettre en question : ce que l'on aime, ce qui nous inspire, ce qui nous influence. On ne sait plus trop pourquoi on suit certaines idées ou que l'on fait certains choix. Parfois en revanche, il suffit d'ouvrir un livre, regarder un film ou avoir une discussion avec quelqu'un et tout redevient si évident. Depuis plusieurs semaines, c'est cet album de Daïtro qui tourne en boucle sur ma sono et qui me rappelle chaque jour quel sens donner à ce qui m'entoure et à ma place dans cet environnement. Je divague ? Ça ne vous parle pas ? Bref... Pourtant, les premières impressions n'étaient pas des plus gratifiantes : « Il est sympa ce nouveau Daïtro, il est plus calme que Laissez vivre les squelettes, mais rien d'exceptionnel. » Puis comme tout bon disque, les écoutes consécutives ont raison de vous. Alors voilà, Y est un sacré album et je compte bien m'attarder dessus en détail. Y s'articule autour des paroles formant un texte uniforme. Y est partagé en dix parties, dix chansons qui n'ont pas de nom. L'artwork se construit sur le propos de Part IX « Au-delà de ses deux collines et de ses deux fleuves... » : la ville de Lyon. Le guitariste et le bassiste nous ont déjà fait le coup pour les Singles series de leur projet parallèle 12XU, mais ici en plus concret et pertinent. Alors Y pour la seconde lettre de Lyon, ou plutôt pour la forme de ses deux fleuves qui se rejoignent (j'aurais tourné la pochette plusieurs fois dans tous les sens pour penser à ça). Part I et Part II s'ouvrent sur le Daïtro tel qu'on le connaît. Une dynamique de l'urgence, des montées mélodiques et le phrasé particulier d'Aurélien qui s'instaure dans les passages d'accalmie. Daïtro va ici à l'essentiel : aucune chanson ne dépasse les cinq minutes, alors qu'auparavant le groupe n'hésitait pas à lorgner avec la dizaine de minutes sur certains titres. Les paroles prennent une place colossale, chargées de bon-sens et d'émotion. Nouveauté, Part III fait part belle au chant clair de Julien. L'envie peut-être de développer ce côté mélodique depuis l'expérience de ce dernier derrière le micro dans 12XU. Part IV ou la grosse claque. Les spoken-words s'élevent en hymne : « Nous les bien faiseurs, nous les bien pensants, nous les prétendus hors normes qui jouons les durs, nous les colériques, nous les cyniques, n'aurait-on rien égaré en route ? ». Part V, interlude en guise d'intro pour Part VI. Part VI qui prend le temps de se construire, une batterie minimaliste, quatre accords de guitare qui se greffent et s'imposent puis les paroles qui prennent le dessus : « Qu'est-ce qu'on tire de nos valeurs quand on leur préfère la théorie ? Et surtout à quel prix ? ». Part VII et son intro « heavy-hardcore ». Nouvelle interlude, Part VIII qui fait le lien avec l'énorme Part IX. Là encore des paroles à scander : « Au delà de ses deux collines, au delà de ses deux fleuves, de ses pubs plein les trottoirs, de ses vitrines, de ses comptoirs ». Et pour finir Part X, les propos parlent d'eux-mêmes : « Il y a simplement l'envie de ne pas regarder tout se taire et mourir à petit feu. Simplement l'envie de ne pas tout voir se transformer en vitrine ». Il est 18 heures. Je déambule en vélo dans les rues encombrées, le regard cynique sur tous ces êtres qui restent bloqués dans leur véhicule. Retour au foyer après une énième journée de travail, pour seul cri d'existence la main sur le klaxon. Et dans ma tête: « Le constat est sévère quand il n'y a plus de colère mais de la suffisance, quand il n'y a plus de débat mais de la satisfaction, de l'agressions pour communication, des réponses pour question ».
Putain d'album.
Putain de groupe.

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